Le nouveau rapport des Nations Unies constate également que l’utilisation de viande d’animaux sauvages à l’échelle nationale augmente considérablement le risque de zoonoses

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Le nouveau rapport des Nations Unies constate également que l’utilisation de viande d’animaux sauvages à l’échelle nationale augmente considérablement le risque de zoonoses

 

Bonn, 15 septembre 2021 - Selon un nouveau rapport publié aujourd’hui, le prélèvement d’animaux pour la consommation de viande d’animaux sauvages à l’intérieur des frontières nationales a des répercussions importantes sur la plupart des espèces terrestres protégées par la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS). Ce rapport est le premier du genre et il couvre 105 espèces de la CMS.

Parmi ses conclusions, le rapport indique que la viande d’animaux sauvages constitue souvent une utilisation majeure et un moteur principal de la chasse légale et illégale, en particulier des ongulés et des primates, surtout en période de conflit ou de famine et dans le cadre des changements d’affectation des terres. Cela a conduit à d’importants déclins et à l’extinction de plusieurs populations de mammifères terrestres migrateurs.

•    70 % des espèces de mammifères terrestres chassées couvertes par la CMS sont utilisées pour la   
     consommation de viande d’animaux sauvages.

     67 des 105 espèces étudiées sont répertoriées comme chassées. Pour ces 67 espèces, la plus grande utilisation prévue
    (47  espèces) est la consommation de viande d’animaux sauvages. D’autres raisons de chasser y sont identifiées : raisons
    culturelles, usage médical, conflits entre les hommes et la faune, prélèvements involontaires et chasse sportive/au
    trophée/mode.

•    Pour la plupart des espèces terrestres couvertes par la CMS, le prélèvement pour usage national est une préoccupation plus importante que le commerce  international.

L’attention mondiale accordée aux prélèvements d’espèces sauvages s’est largement concentrée sur le commerce international. Cependant, le rapport révèle que la grande majorité des prélèvements d’espèces couvertes par la CMS pour la consommation de viande d’animaux sauvages est motivée par leur utilisation directe ou le commerce national. Cela a des conséquences importantes pour les efforts internationaux et nationaux visant à protéger les espèces vulnérables et menacées.   

Globalement, tous types d’utilisation confondus, 34 des 99 espèces concernées par une évaluation de la Liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature et de ses ressources (UICN) sont signalées comme étant utilisées à des fins de subsistance (utilisation directe), 27 sont signalées comme étant commercialisées à l’échelle nationale et 22 comme étant commercialisées à l’échelle internationale. Cependant, lorsque seule la viande destinée à la consommation est prise en compte, 27 espèces (sur 99) sont signalées comme étant utilisées à des fins de subsistance, 10 espèces sont signalées comme étant utilisées pour le commerce national de viande d’animaux sauvages et seules deux espèces sont signalées comme étant utilisées pour le commerce international de viande d’animaux sauvages.  

Amy Fraenkel, Secrétaire Exécutive de la CMS, a déclaré : « Ce rapport met pour la première fois en évidence un besoin clair et urgent de se concentrer sur l’utilisation des espèces migratrices protégées appartenant à la faune sauvage à l’échelle nationale, dans l’ensemble de leur aire de répartition. Nous devons nous assurer que les lois et les efforts d’application des lois à l’échelle nationale permettent de s’attaquer à cette menace majeure pour les espèces couvertes par la CMS. »

Le prélèvement d’animaux pour la consommation de viande d’animaux sauvages accroît considérablement le risque de futures zoonoses

Le rapport examine également le lien entre le prélèvement d’espèces pour la consommation de viande d’animaux sauvages et le risque de zoonoses.

•    Il existe des preuves solides que les épidémies de zoonoses sont liées aux activités humaines. Le prélèvement et la consommation de viande d’animaux sauvages   sont identifiés comme l’agent direct et responsable de la propagation à l’homme du virus de la variole simienne, du SRAS, du virus Ebola soudanais et du virus Ebola zaïrois, avec une transmission interhumaine ultérieure.

•    Au total, 60 agents pathogènes viraux zoonotiques sont signalés comme étant présents chez les 105 espèces migratrices étudiées.

•    L’empiètement des infrastructures et des activités économiques sur des habitats encore intacts a ouvert de vastes zones au prélèvement de viande d’animaux sauvages, augmentant ainsi le risque zoonotique en mettant l’homme en contact avec des populations d’hôtes et d’agents pathogènes jusqu’alors non perturbées.

« Alors que nous cherchons à évoluer vers des systèmes alimentaires mondiaux durables, il est essentiel que l’utilisation d’espèces sauvages à des fins alimentaires soit à la fois légale et durable. La pandémie de COVID-19 nous a appris que la surexploitation de la nature a de graves conséquences. Nous devons de toute urgence sortir du scénario du maintien du statu quo. Ce faisant, nous pourrons sauver de nombreuses espèces au bord de l’extinction et nous protéger des futures épidémies de zoonoses », a déclaré Inger Andersen, Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’environnement.

L’étude cite un certain nombre de facteurs à l’origine de ces prélèvements non durables. Premièrement, la législation et les réglementations nationales peuvent manquer de clarté ou être obsolètes, et ne pas refléter les exigences réelles liées aux facteurs environnementaux, aux traits de population et à la dynamique des espèces concernées. Deuxièmement, la mauvaise application des lois est un facteur clé de l’utilisation non durable dans plusieurs régions. Troisièmement, les conflits civils et les changements d’affectation des terres peuvent entraîner une augmentation des prélèvements de viande d’animaux sauvages. Quatrièmement, les animaux migrateurs traversent des pays et des régions appliquant une grande variété de lois et de mesures d’application des lois différentes, ce qui accroît le risque de prélèvements non durables aux différentes étapes de leur migration. Enfin, l’urbanisation croissante et la vente accrue de viande d’animaux sauvages en tant que produit de luxe exercent une pression supplémentaire sur les animaux protégés.

Le rapport indique également que les schémas des migrations saisonnières font des espèces migratrices une cible particulièrement vulnérable face aux chasseurs, aux braconniers et autres consommateurs, en raison du moment bien connu de l’arrivée des espèces dans une zone donnée.

Il est important de noter que la faune contribue à la sécurité alimentaire, à la santé, aux revenus, aux emplois et à l’identité culturelle de nombreuses économies rurales et de certains des peuples autochtones et communautés locales les plus vulnérables de la planète. Toute réponse politique doit tenir compte de ces utilisations, ainsi que des facteurs d’insécurité alimentaire.

La plupart des espèces couvertes par l’étude sont signalées comme étant menacées par la chasse

La chasse (à toutes fins) est considérée comme une menace majeure pour la survie de nombreuses espèces. Si l’on exclut les chauves-souris (chiroptères), l’étude révèle que 98 % (41 sur 42) des espèces couvertes par la CMS concernées par une évaluation de la Liste rouge de l’UICN sont menacées par la chasse. La chasse menace 95 % (21 sur 22) des espèces classées par l’UICN comme étant en danger, en danger critique ou éteintes à l’état sauvage.

L’étude établit des liens entre la chasse et le déclin des populations de plusieurs espèces. Dans cette étude, 77 % (40 sur 52) des espèces de la CMS qui ont été évaluées par l’UICN comme ayant des populations en déclin sont répertoriées comme menacées par la chasse. Par exemple, la plupart des ongulés migrateurs encore présents à l’état sauvage ont connu des déclins de population importants qui peuvent être attribués à la chasse. Toutes les sous-espèces de chimpanzés et trois des quatre sous-espèces de gorilles signalées comme étant fortement menacées par la chasse connaissent également d’importants déclins de population. Globalement, l’évaluation du rapport montre que les prélèvements ont une incidence directe sur les populations de plus de la moitié (58 sur 105) des espèces étudiées, et des répercussions importantes sur au moins 42 % (40 sur 105) d’entre elles.

L’étude révèle également que les données sont insuffisantes pour permettre une évaluation concluante des prélèvements de chauves-souris, qui représentent la moitié des espèces de mammifères terrestres de la CMS étudiées. Cela pourrait indiquer qu’elles sont soit rarement chassées, soit que la chasse de cette espèce est sous-déclarée. 

 

La demande de viande d’animaux sauvages en tant que produit de luxe devrait augmenter avec le développement de l’urbanisation

Si la viande d’animaux sauvages peut constituer une importante source d’alimentation pour les communautés rurales, elle ne joue pas souvent un rôle significatif dans la sécurité alimentaire des citadins, pour qui elle représente un produit de luxe. Pourtant, à mesure que les populations urbaines s’accroissent, la demande de viande d’animaux sauvages augmente. Même de faibles taux de consommation par habitant peuvent conduire à de grandes quantités totales de viande d’animaux sauvages consommée, et la demande urbaine alimente des prélèvements non durables croissants dans les zones environnantes, contribuant à une pression accrue exercée sur la faune et à une menace plus grande pour l’approvisionnement alimentaire des communautés rurales qui dépendent de la faune.

Les données disponibles montrent que, par exemple, la roussette paillée (Eidolon helvum) en Afrique occidentale et centrale, et le chimpanzé commun (Pan troglodytes) au Cameroun et au Nigeria sont vendus en grand nombre sur les marchés urbains. L’amélioration des transports, la disponibilité des armes à feu et des incitations financières élevées figurent parmi les moteurs d’un accès accru à la viande d’animaux sauvages dans les villes.

La protection des espèces de mammifères terrestres de la CMS est incohérente

La plupart des espèces de mammifères terrestres de la CMS sont protégées à des degrés divers par les lois actuelles, les niveaux de protection fluctuant selon les espèces et les pays. Dans de nombreux pays tropicaux, une réforme urgente de la législation actuelle en matière de chasse est nécessaire. Cela inclut les pratiques de chasse à des fins de subsistance, qui sont souvent incompatibles avec les législations sur la chasse.

Deux thèmes ressortent de plusieurs études de cas : premièrement, alors que les espèces couvertes par la CMS peuvent être protégées par des lois nationales et internationales, dans de nombreux pays, la capacité et les efforts d’application des lois sont faibles, et la chasse non réglementée se poursuit donc à un rythme soutenu. Deuxièmement, les populations d’espèces qui ont connu un fort déclin en raison d’une chasse excessive se sont rétablies grâce à la protection juridique et à l’application des lois.

Recommandations et conséquences pour l’avenir :

•    une plus grande attention doit être accordée à l’utilisation et au commerce des espèces de la CMS à l’échelle nationale pour faire face aux menaces à la conservation ;
•    la législation et les réglementations nationales en matière de chasse devraient être revues et mises à jour si nécessaire ;
•    les capacités de suivi et d’application des lois devraient être examinées et renforcées ;
•    les facteurs contribuant à l’utilisation illégale ou non durable de la faune pour une consommation nationale devraient être mieux identifiés et traités ;
•    les recherches sur la viande d’animaux sauvages doivent avoir pour priorité immédiate de mieux comprendre les risques de débordement associés à l’utilisation et au 
     commerce de la viande d’animaux sauvages, ainsi que les facteurs susceptibles d’accroître ou de réduire ces risques ;
•   des données comparables et compilables sur les prélèvements liés à la chasse et l’abondance des espèces devraient être recueillies pour toutes les espèces étudiées afin
     de permettre des évaluations plus complètes des répercussions de la chasse sur la consommation et le commerce d’espèces sauvages ; et
•   une coopération internationale supplémentaire sera nécessaire pour lutter contre les prélèvements de viande d’animaux sauvages chez les espèces migratrices dont les
    aires de répartition s’étendent sur plusieurs pays.

 


 

Notes pour les éditeurs

Ce rapport contribue à la mise en œuvre de la décision 13.109 de la CMS : gérer l’utilisation non durable de la viande d’animaux sauvages terrestres et aviaires des espèces migratrices d’animaux sauvages. Il a été préparé pour le Secrétariat de la CMS par le Centre de recherche forestière internationale (CIFOR).

Conférence de presse virtuelle pour le lancement du rapport

Tous les membres des médias sont invités à assister à un lancement médiatique virtuel le mercredi 15 septembre 2021 à 15 h 00 HAEC.
Veuillez utiliser le formulaire d’inscription pour pouvoir assister à la conférence de presse.

Lien vers le rapport
https://www.cms.int/publication/wild-meat-report

Ressources visuelles liées à la viande d’animaux sauvages, avec la permission du CIFOR

Bushmeat general | Flickr

Kit des médias sociaux

https://bit.ly/WildMeatReport_SocialMedia

 

 À propos de la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS)

Traité environnemental des Nations unies, la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS) offre une plateforme mondiale pour la conservation et l’utilisation durable des animaux migrateurs et de leurs habitats. Ce traité unique réunit des gouvernements et des spécialistes de la faune pour répondre aux besoins de conservation des espèces migratrices terrestres, aquatiques et aviaires et de leurs habitats dans le monde entier. Depuis l’entrée en vigueur de la Convention en 1979, le nombre de ses membres n’a cessé d’augmenter, pour atteindre 132 Parties d’Afrique, d’Amérique centrale et du Sud, d’Asie, d’Europe et d’Océanie.

Consultez le site : https://www.cms.int/fr/

 

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Pour plus d'informations, veuillez contacter :

Aydin Bahramlouian, Coordinateur intérimaire, Unité conjointe de communication des Secrétariats de la CMS et de l'AEWA, email: [email protected]

 

Last updated on 26 November 2021